Deux illustres pragois : Kafka et Dvorak
Franz Kafka (1883-1924) est né à Prague à Josefov, le quartier juif de la ville. Prague était alors la capitale de la Bohême et faisait partie de l’empire austro-hongrois. Dans les grandes villes de l’empire telles que Prague ou Budapest, la langue administrative utilisée par les marchands et les citadins, jusqu'au milieu du XIXe siècle, était l’allemand alors que les campagnes conservaient leur langue propre.
Kafka, pragois de langue allemande, est considéré comme l'un des écrivains majeurs du XXe siècle.
Comme vous avez pu le constater dans mes articles précédents, Franz Kafka est un peu partout dans la ville. Je vous ai déjà parlé de quelques lieux où il a vécu comme la maison à sgraffites dite "À la Minute" vers la Place de la Vieille ville, le Palais Kinsky sur la Place dans lequel se trouvait son lycée public allemand, la petite maison bleue, numéro 22, de la ruelle d’or dans l’enceinte du château. Mais il y en a bien d’autres.
À l’angle de la rue Maiselova et de la Place Kafka se trouve un immeuble bâti à l’emplacement de sa maison natale. Une plaque mémoriale en bronze est là pour le rappeler.
Lors de la visite de l'ancien quartier juif, il ne faut pas manquer sa statue en bronze. Elle est due au sculpteur Jaroslav Róna et fut érigée en 2003 sur une petite place, entre la synagogue espagnole et l’église Saint-Esprit.
Une fois le Pont Charles traversé, tout de suite à droite se trouve le petit quartier sur les berges de la Vlatva où une ancienne briqueterie a laissé place au Musée Franz Kafka.
Une large cour avec en premier plan la sculpture de Cerny, “Personnages qui urinent” mène à l’entrée du musée.
Le musée est à l’image des écrits de Kafka qui aborde les thèmes de la solitude, des rêves, des peurs et des complexes. Le personnage est perdu et déboussolé. L'atmosphère particulière des romans et nouvelles de Kafka a d’ailleurs donné naissance à l’adjectif, “kafkaïen” qui renvoie à quelque chose d'absurde, d'illogique et d'incompréhensible. Le manque d’espoir et l’absurdité que l'on retrouve dans toute son œuvre, sont des traits typiques de ce qui sera repris plus tard par l’existentialisme.
Le musée se visite totalement dans le noir et nous plonge dans l’univers de l’écrivain. Seules les vitrines sont éclairées et au fil de la déambulation, naît un sentiment étrange, déstabilisant.
Kafka sera peu connu du public de son vivant. Il publiera en 1915, La Métamorphose et en 1919, Lettre au père. La plupart de ses œuvres seront éditées à titre posthume et découvertes seulement au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Le Procès sera publié en 1925 un an après sa mort.
La plupart des œuvres de Kafka présentées dans le musée sont en édition originale ainsi que sa correspondance, ses journaux intimes, ses manuscrits auxquels s’ajoutent des photographies et des dessins.
Atteint de tuberculose, Franz Kafka s’est éteint le 3 juin 1924 à l’âge de 40 ans. Son corps sera rapatrié du sanatorium de Kierling près de Vienne et inhumé dans le nouveau cimetière juif de Prague. Ses sœurs mourront pendant la Seconde guerre mondiale dans un camp de concentration.
Antonin Dvorak (1841-1904) est une autre figure illustre de Prague. Accepté en 1857 à l’école d’orgue de Prague, il en ressort diplômé et rejoint un orchestre de variété. Son expérience de musicien d’orchestre lui permet de découvrir de l'intérieur un vaste répertoire classique et contemporain. Tout en jouant, il commence à composer des œuvres ambitieuses dont deux premières symphonies en 1865.
En sortant du musée Kafka, on peut voir de l’autre côté de la Vlatva, un grand bâtiment néo-renaissance qui est le Rudolfinum. Il sert à la fois de salle de concert, notamment pour l’orchestre philarmonique tchèque et de lieu d’expositions. Inauguré en février 1885, il doit son nom au prince Rodolphe, héritier de l’Empire austro-hongrois, fils de l’empereur François-Joseph 1er et de Sissi.
Le Rudolfinum est étroitement lié à Antonin Dvorak, géant de la musique classique tchèque. La grande salle de concert, dans laquelle il dirigea la première interprétation de sa Symphonie du Nouveau Monde par l’Orchestre philharmonique tchèque, porte son nom.
Dvorak démissionne de l’orchestre en1871 pour se consacrer entièrement à la composition. Il vit des leçons particulières qu'il donne. Alors qu’il est déjà célèbre dans le monde musical, il est nommé de 1892 à 1895 directeur du Conservatoire national de New-York. Il y composera la Symphonie du Nouveau Monde. Le succès est foudroyant mais l'intérêt de Dvorak pour la musique noire soulève une très vive controverse sur le continent américain.
La fin de sa vie est surtout consacrée à la composition d’opéras dont le plus célèbre reste Rusalka créé en 1901. Pendant cette période, il dirige également le Conservatoire de Prague.
L’œuvre de Dvorak est immense et variée. Il était considéré de son vivant comme un personnage de stature internationale. Bien que sa musique ait eu du mal à s'imposer en France, quelques semaines avant sa disparition, des émissaires de la mairie de Paris firent un voyage en Bohême pour lui remettre une médaille d'or décernée par le Conseil municipal.
Dans le musée qui lui est consacré, on y trouve un grand nombre de manuscrits, correspondances, objets personnels et détails sur la vie du compositeur.
Le musée se trouve dans la Villa Amerika construite en 1720 pour un noble pragois. L’architecte l'a conçue dans le style français qui était à la mode à l’époque et qui annonçait la période rococo. La ville de Prague a racheté la villa en 1843 et l’a utilisée à des fins variées avant de la consacrer entièrement au souvenir d’Antonin Dvorak après la Seconde guerre mondiale. L’intérieur est un mélange agréable de luxe et d’intimité.
Antonin Dvorak est enterré au cimetière de Vysehrad, sur une colline dominant la ville. Un buste à son effigie est visible au 14 de la rue Zitna, sur la façade de l'immeuble où il a vécu.
Il y a bien-sûr beaucoup d'autres personnalités pragoises. Je citerai l’écrivain et poète Jan Neruda, (1834-1891), né dans le quartier de Mala Strana, dans la maison "Aux deux soleils" dans la rue qui porte désormais son nom. Elle part de la place Malostranské et monte jusqu'au château.
Son œuvre promeut l'idée d'une renaisssance de la culture tchèque. Sa réputation de critique et sa verve satirique lui valurent quelques problèmes. En 1871, Il est déclaré traître à la nation austro-hongroise qu'il ne s'est pas privé de critiquer suite à des voyages fréquents en Allemagne, France, Italie et Grèce.
Jan Neruda est enterré au cimetière de Vysehrad
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